L’arabe est, à l’instar des autres grandes langues de communication internationale, une langue apprise et pratiquée par de nombreux non-arabophones.
Or, les didacticiens et pédagogues du monde arabe n’ont, jusqu’à présent, pris en considération ce fait qu’à la marge.
Pour eux il ne constitue pas un enjeu important.
Il en découle, par rapport aux autres grandes langues de communication,
- un déficit considérable en outils de base au plan linguistique (manque de référentiels)
- une réflexion didactique limitée pour ce qui est de l’arabe langue étrangère
- peu de productions pédagogiques de qualité
Les productions pédagogiques
La plupart de ces productions sont calquées sur l’apprentissage de l’arabe par les arabophones :
- très peu de place à la langue orale
- enseignement essentiellement fondé sur l’acquisition de la lecture et de l’écriture et l’apprentissage de la grammaire.
En dehors du monde arabe, l’enseignement se divise pour l’essentiel en
- un apprentissage académique à l’université pour des spécialistes ou non-spécialistes, souvent fondé sur la trilogie lecture-grammaire-traduction، servant de matrice prestigieuse à l’enseignement dispensé dans diverses institutions
- sur une échelle plus restreinte un apprentissage à visée très pratique par des professionnels faisant une place assez large à l’acquisition d’un dialecte
- un enseignement à destination des populations d’origine arabe ou des populations musulmanes, inspiré des méthodes traditionnelles et calqué sur l’enseignement à destination des arabophones même quand il se réclame de l’innovation pédagogique et technologique
En France – et dans une moindre mesure aux Pays Bas et en Belgique pendant un temps – l’enseignement de l’arabe langue vivante étrangère dans le système éducatif (primaire et secondaire) a permis de développer une réflexion didactique et de construire des outils pédagogiques pratiques d’une importance considérable. L’arabe a le même statut que les autres langues, ce traitement « égalitaire » imposant des contraintes, comme celle de se conformer au CECRL : des programmes (curricula) non spécifiques, des évaluations et certifications non spécifiques, des supports et des outils conformes aux exigences communes.
Problème théorique |
Réponseshabituelles |
Propositions pratiques |
Dialectes selon le CECRL |
se conformer au CECRL en considérant que seul l’arabe standard est concerné |
mener une réflexion prenant en compte et le CECRL et la réalité linguistique de l’arabe |
Variation linguistique |
-ignorer ou contourner
– offrir deux enseignements séparés dans le meilleur des cas |
– supports authentiques, même à l’oral
– situations de communication proches de la réalité |
La situation linguistique de l’arabe n’est pas figée. Elle a évolué par rapport à celle qu’on observait voici 25-30 ans, et pas à sens unique !
Davantage de gens comprennent et pratiquent l’arabe standard et les dialectes autres que leur dialecte local, grâce à l’audio-visuel et surtout grâce aux télévisions satellitaires.
L’usage des dialectes à l’écrit se diffuse
- Dans la sphère publiquenotamment à travers les publicités

- Et dans la sphère privée via les écrits électroniques (SMS, chats, courriels, et autres réseaux sociaux).
Les deux variétés, standard et dialecte, sont complémentaires et indissociables, comme le montre l’exemple du maltais, dialecte arabe devenu langue à part entière mais coupée de l’arabe standard qui ne la « nourrit » plus et des autres dialectes arabes.
Propositionpratique :
Tenir compte de la réalité linguistique qui est que l’arabe est UNE langue doit conduire à l’enseigner dans toute son étendue et donc toutes ses variétés sans mutiler ni même scinder cet enseignement et donc cette langue. C’est un vrai défi !!
Autres problèmes (points non traités oralement faute de temps)
Problème théorique |
Réponses habituelles |
Propositions pratiques |
Langue standard d’aujourd’hui vs. fusha des manuels |
– réclamer le respect de la norme
– corriger les « fautes » |
– accepter un écart écrit/oral comme dans les autres langues (ex. vocalisation)
– accepter certaines évolutions (noms propres, nombres) |
Grammaires/grammaire de l’arabe d’aujourd’hui |
-reproduire les règles même quand elles ne correspondent plus à l’usage
– surdimensionner la morphologie car elle ne pose pas de problème |
tenir compte dans les grammaires d’enseignement des recherches linguistiques portant sur les corpus contemporains |
Vocalisation |
-principe du « tout ou rien » en matière de vocalisation des textes
– absence de progressivité |
– se demander l’objectif précis de la lecture
– n’indiquer que les voyelles indispensables
– favoriser la mémorisation des voyelles non prédictibles par la morphologie ou la syntaxe en cessant de les indiquer quand elles sont connues |